Nous vous proposons de poursuivre la découverte du travail d’Améziane Kezzar, qui a fait une adaptation en kabyle et au contexte kabyle de toute l’œuvre chantée de Georges Brassens. Un défi audacieux qu’il a relevé avec talent, s’attachant au texte, à ses sens, à la liberté joyeuse et dérangeante qui est la sève inimitable de ce grand poète du sud de la France. Nous vous avons mis le texte en kabyle, sa traduction en français mot à mot afin de mesurer la nouveauté que sa transcription ailleurs induit, et enfin le texte original d’inspiration. Bonne écoute et bonne lecture.


Iḥbiben                                                Les amis

Tiẓgi i wen-yehwan kcem-tt,                         La forêt qui vous plaît, entrez-y,

Deg-s a ttafem ijeǧǧigen.                                À l’intérieur vous trouverez des fleurs.

Nekk ma tkecmem-d ɣer wul-iw,                Moi si vous entrez dans mon cœur,

Deg-s a d-tafem iḥbiben.                                À l’intérieur, vous trouverez les amis.

Di taddart heddṛen fell-i,                              Au village on médit de moi,

Qqaren-as berrik wul-is,                               On dit comme son cœur est noir,

Deg-s anwa yettawi,                                        Qui y porte-t-il à l’intérieur,

Ḥaca afuḥan d lmetl-is.                                  Seulement le méprisable et ses semblables.

Tiẓgi i wen-yehwan kcem-tt,                        La forêt qui vous plaît, entrez-y,

Deg-s a ttafem ijeǧǧigen.                               À l’intérieur vous trouverez des fleurs.

Nekk ma tkecmem-d ɣer wul-iw,               Moi si vous entrez dans mon cœur,

Deg-s a d-tafem iḥbiben.                               À l’intérieur, vous trouverez les amis.

M’ara yekfu ccṛab g wexxam-iw,               Quand le vin manque chez moi,

Deg-i ur sfuttuyen.                                         De moi ils ne se moquent pas.

Ḥemmelen ad swen aman-iw,                   Ils aiment boire mon eau

S yissen ay ttṣekkiren.                                  C’est avec ça qu’ils se saoulent.

Tiẓgi i wen-yehwan kcem-tt,                     La forêt qui vous plaît, entrez-y,

Deg-s a ttafem ijeǧǧigen.                            À l’intérieur vous trouverez des fleurs.

Nekk ma tkecmem-d ɣer wul-iw,           Moi si vous entrez dans mon cœur,

Deg-s a d-tafem iḥbiben.                           À l’intérieur, vous trouverez les amis.

Yal ṣṣbeḥ m’ara zewǧeɣ                              Chaque matin que je me marie,

Tteddun d iqeffafen.                                  Ils participent du cortège,

Tameddit im’ara bruɣ,                              Le soir quand je divorce,

D inagan, a d-uɣalen.                                Ils reviennent en témoins.

Tiẓgi i wen-yehwan kcem-tt,                  La forêt qui vous plaît, entrez-y,

Deg-s a ttafem ijeǧǧigen.                         À l’intérieur vous trouverez des fleurs.

Nekk ma tkecmem-d ɣer wul-iw,         Moi si vous entrez dans mon cœur,

Deg-s a d-tafem iḥbiben.                         À l’intérieur, vous trouverez les amis.

Ḥaca nutni i yeẓran,                                  Eux seuls connaissent,

I yeẓran i yi-iqerḥen.                                Connaissent ce qui me blesse.

Yal tikkelt im’ara mmeteɣ,                   Chaque fois que je meure,

D nutni i yi-neṭṭlen.                                 Ce sont eux qui me mettent en terre.

Tiẓgi i wen-yehwan kcem-tt,               La forêt qui vous plaît, entrez-y,

Deg-s a ttafem ijeǧǧigen.                      À l’intérieur vous trouverez des fleurs.

Nekk ma tkecmem-d ɣer wul-iw,      Moi si vous entrez dans mon cœur,

Deg-s a d-tafem iḥbiben.                     À l’intérieur, vous trouverez les amis.

Ameẓyan KEZZAR                                 Ameziane KEZZAR

Amawal / Vocabulaire :

Aḥbib/ iḥbiben (ami) = ameddakwel / imeddukwal (ami/ compagnon/camarade)

Tiẓgi / tiẓegwa (foret)

Afuḥan / ifuḥanen = méprisable / mauvaise fréquentation / répugnant (qui sent mauvais)

lmetl / lemtul = modèle/ exemple ( qui sont semblables)

aqeffaf / iqeffafen = homme participant d’un cortège

bru (divorcer)

anagi / inagan (témoin)

sfutti = se moquer / mépriser

Aḍris n tehregt sɣur Georges Brassens :  » Di teẓgi n wul-iw »

Texte d’inspiration de Georges Brassens :  » Au bois de mon coeur ».

Au bois d’Clamart y a des petites fleurs
Y a des petites fleurs
Y a des copains au, au bois d’mon cœur
Au, au bois d’mon cœur

Au fond de ma cour j’suis renommé
J’suis renommé
Pour avoir le cœur mal famé
Le cœur mal famé
Au bois d’Vincennes y a des petites fleurs
Y a des petites fleurs
Y a des copains au, au bois d’mon cœur
Au, au bois d’mon cœur
Quand y a plus d’vin dans mon tonneau
Dans mon tonneau
Ils n’ont pas peur de boire mon eau
De boire mon eau
Au bois d’Meudon y a des petites fleurs
Y a des petites fleurs
Y a des copains au, au bois d’mon cœur
Au, au bois d’mon cœur
Ils m’accompagnent à la mairie
À la mairie
Chaque fois que je me marie
Que je me marie
Au bois d’Saint-Cloud y a des petites fleurs
Y a des petites fleurs
Y a des copains au, au bois d’mon cœur
Au, au bois d’mon cœur
Chaque fois qu’je meurs fidèlement
Fidèlement
Ils suivent mon enterrement
Mon enterrement
Des petites fleurs
Au, au bois d’mon cœur

Illustration : https://thanagra.typepad.com/blog/2011/10/319.html